L’art de recevoir

Le dernier cadeau que j’ai offert est un sac de coton tout simple pour transporter les achats. Simple, oui, mais pas ordinaire ! C’est que la destinataire, ma sœur, a des critères bien précis pour ses sacs de coton. Elle aime ceux qui se chiffonnent tout petits pour se ranger dans un sac à main et qui ont une anse bien large pour se porter à l’épaule. Elle craque aussi pour les designs spéciaux et les messages significatifs imprimés sur des matériaux qui respectent l’environnement.

Alors vous comprendrez que lorsque j’ai vu LE sac, je l’ai tout de suite acheté ! Comme nous étions ensemble ce jour-là, je me suis empressée de le lui offrir sur le champ. Et ce qui m’a fasciné, c’est qu’elle a pris le sac et qu’elle m’a dit merci de tout son cœur. Je sentais sa joie de recevoir ce cadeau parfaitement dans ses goûts. Elle aurait pu se l’acheter elle-même, mais je suis certaine que son plaisir n’aurait pas été le même. C’est cela qui me fascine chez elle : sa capacité à recevoir avec gratitude.

Ma sœur aurait aussi pu me répondre « Non, voyons, tu n’aurais pas dû » ou « ce n’était pas nécessaire ». Pendant longtemps, c’est ce qu’elle aurait dit et moi aussi d’ailleurs. Ces réponses ne sont-elles pas beaucoup plus communes ? Dès qu’on nous offre quelque chose avec bonté, la plupart d’entre nous sentons le besoin urgent de rectifier le tir. Je me rappelle avoir répondu au compliment sincère d’une amie « Quelle belle robe, elle te va si bien! » par « Ah, elle était en solde ». Un air chagriné a alors remplacé son sourire et je me suis bien douté qu’elle ne s’y ferait pas reprendre de ci-tôt. Qu’est-ce qui m’empêchait de lui répondre simplement « Merci »?

Qu’est-ce qui nous retient?

Recevoir est ardu pour la plupart d’entre nous, comme si cela était contre-nature. Il est vrai qu’en occident, notre bagage judéo-chrétien nous influence encore beaucoup. Recevoir aisément, n’est-ce pas souvent perçu comme de l’égoïsme et de la vanité ? Refuser le compliment de mon amie me permettait en somme d’éviter l’étiquette de prétentieuse. Acquiescer aurait signifié que je me trouve belle, ce qui n’est pas très bien accepté dans notre société. Enfin, c’est ce que je croyais à ce moment-là.

D’un autre côté, on peut parfois aussi percevoir comme une faiblesse ou un échec le fait de recevoir quelque chose. Je me rappelle une époque où j’étais épuisée en raison de mon sommeil trop souvent entrecoupé par les pleurs de mon bébé. Je n’en pouvais plus, et pourtant, je ne demandais pas d’aide. Il m’aurait alors fallu l’accepter ! Recevoir de l’aide aurait signifié pour moi que je n’étais pas à la hauteur. Malgré tout, lorsque l’on m’aidait d’une façon ou d’une autre, je trouvais toujours le moyen de me sentir coupable au point de mettre l’autre mal à l’aise.

Paradoxalement, à cette époque, j’étais la première à me demander quand j’allais enfin pouvoir me reposer, être aimée et valorisée. Je me sentais seule et victime du monde pénible et sans pitié dans lequel j’évoluais. Je cherchais des réponses à mes problèmes à l’extérieur de moi. C’était la faute de ceci ou de cela si je ne pouvais pas être aussi bien et heureuse que je le souhaitais.

Apprendre à recevoir

Ma transformation s’est amorcée quand j’ai enfin pris conscience que le problème ne venait pas des autres. Non, ce n’était pas les autres qui me traitaient mal: c’était moi qui n’étais pas capable de recevoir tout ce qui m’était offert. Comme si mon robinet était fermé : l’eau était présente en abondance dans la conduite, mais tant que le robinet restait fermé, rien ne viendrait à moi.

C’était donc clair, si je voulais être plus heureuse, mieux valait cultiver ma capacité à recevoir. J’ai donc choisi de laisser couler l’eau! J’ai commencé par m’offrir des activités nourrissantes comme des cours de danse et de yoga. Je me suis surprise à me complimenter intérieurement de plus en plus souvent et à me féliciter de mes bons coups. Je me suis cuisiné mes repas préférés en les présentant de façon à les trouver irrésistibles, juste pour le plaisir de mes yeux et de mes papilles.

Au départ, il ne m’a pas été facile de profiter pleinement de ces marques de bonté envers moi-même. Je me suis sentie coupable : n’étais-je pas affreusement égoïste ? Toutefois, à force de vivre pleinement ces moments, je suis devenue de plus en plus généreuse de mon temps et de mon énergie avec les autres. J’ai arrêté d’avoir l’impression de faire mon devoir. J’ai pris goût à partager avec autrui. Cela m’a rapidement convaincue que j’allais dans la bonne direction et le sentiment de culpabilité s’est graduellement dissipé.

Depuis, tout a changé en moi et autour de moi. Plutôt non, rien n’a vraiment changé. Mes proches sont les mêmes, le système dans lequel j’évolue aussi. Néanmoins, ma capacité à recevoir avec gratitude invite les autres à faire preuve de générosité à mon égard. Que ce soit une voisine qui me propose de prendre soin de mes animaux en mon absence, une caissière qui applique une promotion qui n’était pas affichée, un livre inspirant qu’une cliente m’envoie par la poste pour me remercier ou un passant qui m’offre un immense sourire, je reçois ainsi plusieurs fois par jour des rayons d’amour qui m’échauffent le cœur.

C’est simple, tout ce que j’ai fait, c’est laisser le mouvement naturel entre donner et recevoir s’installer dans ma vie, sans tenter de m’interposer. Grand bien m’en fasse!

Geneviève Tremblay

Geneviève Tremblay

Coach, conférencière et co-fondatrice de Bonheur en vrac, une entreprise de développement web, inspirée par la liberté, l’autonomie et un encadrement sans contrôle, Geneviève assure la présidence et les relations avec les clients-entrepreneurs.
Oui, on peut s'entraîner à la joie ! Pour qui est prêt a marcher le pied léger en sifflotant à la vie.
Pour bâtir la vie de vos rêves. Parce que tout le monde souhaite une vie épanouie, stimulante et heureuse !

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